L'Association de Réflexion et de Recherche Clinique en Psychomotricité de Lyon et sa Région vise à promouvoir la recherche clinique en psychomotricité par divers moyens notamment : l’organisation de séminaires, colloques, groupes de réflexion. Soutenir des projets individuels ou collectifs de recherche sur la clinique psychomotrice, favoriser et/ou rechercher la collaboration avec des structures à même d’apporter une contribution directe ou indirecte au but poursuivi par l’association et tout particulièrement avec l’Institut de Formation en Psychomotricité de Lyon.
Elle s’adresse à tout psychomotricien désireux d’engager un travail d’approfondissement théorico-clinique, quel que soit son champ d’exercice professionnel ou son référentiel théorique et clinique.
Susciter les échanges, favoriser le débat entre psychomotriciens, soutenir la réflexion et la recherche à propos de la pratique, telles sont les ambitions de l’ARRCP Lyon et région. Dans cet objectif, l’association mise sur l’engagement de ses membres dans une démarche qui consiste à se confronter aux difficultés et aux doutes rencontrés dans la clinique, à approfondir ses intuitions cliniques, à les arrimer à des concepts théoriques, à transmettre et discuter les résultats de ses travaux.

mercredi 23 avril 2014

Un aperçu du Café psychomot' du Mardi 15 avril 2014


C'est à l'abri d'un vent frais printanier que nous nous sommes réunis, au Mondrian,  Mardi 15 avril pour ce dernier café psychomot' de la saison, sur le thème «  Quand les médiations aident à la créativité »

Marite Charbonnier, qui à partir de sa lecture de trois textes, celui de J.L Tourvieille « les objets médiateurs dans les psychothérapies et les thérapies à médiation », celui de René Roussillon «  Médiation et création. Pour une métapsychologie de la médiation » et celui de Blandine Maliaud « la médiation corporelle en psychomotricité », s'est lancée avec nous, de manière très vivante et nous parle d'abord de sa compréhension de ces 3 articles, en la croisant avec sa clinique.

Du texte de J.L Tourvieille, Marite nous rappelle la définition de l'objet médiateur et associe en le citant, à Alphonse de Lamartine « Objets inanimés, avez-vous donc une âme qui s'attache à notre âme... ».
L'objet médiateur, au sens de Fedida, est « l'objet chose, plus ou moins concret, qui se caractérise par sa matérialisation, par l'expérience de perception et de motricité, dans une discontinuité entre sujet et objet chose ».
Marite nous dit alors que percevoir les objets comme extérieur à elle, l'aide à se dégager de ce qu'elle peut vivre en séance.
Pour J.L Tourvielle, l'objet médiateur recouvre plusieurs fonctions essentielles :
·         celle de pare-excitation, en délimitant par la matérialité
·         celle de tiers dans la relation : un intermédiaire entre soi et l'autre (idée également reprise dans le texte de Blandine Maliaud), un objet commun à partager, à créer
·         celle d'une proposition d'accordage.

Dans les thérapies psychomotrices le corps de psychomotricien est engagé tout comme le corps du patient. L’objet chose met de la distance, créant un espace de rencontre.
Marite, en nous reparlant de Lamartine, vient interroger les qualités psychiques de l'objet.
Elle nous dit que pour elles, ce sont les patients qui choisissent ces objets qui permettent pour chacun de se décoller.
Elle relève aussi la part mystérieuse de ces choix et l'intuition de psychomotricien, et l'après coup dans lequel cela se joue.
Les objets proposés en séance permettent une observation et le ressenti de l'accordage et de l'ajustement avec le patient.
·         Celle d'aider à la mise en représentation et à la mentalisation. Marite nous fait remarquer que cette notion est commune aux 3 textes.
Elle nous rapporte aussi son intérêt pour l'objet ballon de baudruche qui permet à la motricité de se déployer à partir de ses qualités de fragilité, de malléabilité, et d’imprévisibilité. Avec Lucas, un de ses petits patients, qu'elle décrit comme tonique et dur, le ballon va permettre que la destructivité se joue et devienne agressivité, communiquant par cet intermédiaire.

Du texte de René Roussillon, Marite dégage la piste du grandir psychiquement en avançant sur nos expériences en les intégrant.
Dans le temps de nos séances, nous avons aussi à pouvoir nous représenter aussi.
Quand Roussillon parle de traces mnésiques perceptives, Marite pense à cette matière première que l'enfant vient mettre en jeu en séance de psychomotricité. Une matière première complexe où se mêlent Moi, non-Moi, pulsions, perceptions.
Roussillon parle de se représenter un vécu, de se le présenter à nouveau et de la nécessité de le simplifier en le décondensant par déplacement et transfert sur d'autres modalités.
Marite nous fait part de son expérience de psychodramatiste et de comment les objets partiels thérapeutes se prêtent dans leur manière d'être, dans leur corps, dans leur psyché à des niveaux pré-conscients, à la mise en scène pour proposer au patient des représentations.
Roussillon parle aussi dans son article de la fonction maternelle à s'ajuster au plus près, tout en étant décalé.
Marite pense à ce renvoi, ce miroir que nous pouvons faire à nos patients.

Du texte de Blandine Maliaud, Marite dégage la notion de ce qui sort de l'immédiateté. En effet elle introduit la question de ce léger différé.
La question du corps est posée : peut-on considérer le corps comme une médiation ?
Et Marite de nous dire qu'elle s'interroge, ne sait pas, si l'on considère, comme l'auteur, le corps, dans sa dimension pulsionnelle, tonique, d'éprouvés et d'impressions.
Celui lui fait penser aux travaux en neurosciences d'Ansermet et Magistretti, quand elle insiste sur l'inscription des impressions dans les cellules.
Marite va se laisser aller à nous livrer ces images à elle, teintées de sa sensibilité artistique à la peinture et à la musique: une palette émotionnelle et une tonalité émotionnelle dans la rencontre psychomotrice afin d'éprouver avec l'autre et de pouvoir rester présente à lui.
Le cas cité par Blandine Maliaud dans son texte évoque à Marite un de ses patients, Tony. Elle décrit un déchaînement dans les séances et une attention pour éviter toutes les mises en danger de cet enfant. Marite vit les séances comme un chaos, avec des éprouvés d'épuisement, d'impuissance et d'angoisse.
Le cadre de soin, soutenu par le médecin et la maman de Tony, a permis que cela tienne. Marite fait l'hypothèse que cet enfant avait certainement besoin qu'elle puisse s'écouler avec lui.
Ainsi de séances où les corps s'écroulaient brutalement, quelque chose du monde interne de Tony s'est déplacé en mettant en corps des chutes sur des objets et un transfert directement sur des Kapla qui s'écroulaient.
Les images qui traversaient l'actualité locale à ce moment (destruction de la muraille de Chine de St Etienne, le tsunami en Indonésie), ont fait médiation et autorisé l'expression de la destructivité de Tony.
Marite fera trace photographique avec Tony d'une construction qui aura finalement pu tenir, symbole de ce qui tient autant pour Tony que pour Marite.
Marite, pour conclure sa riche présentation, nous parle de son interrogation  sur ce qu'elle utilise elle pour intégrer et métaboliser ce que les patients lui font vivre en séance.
Elle a recours à des images internes, des médiations de l'ordre de la culture, de l'art, des thèmes bibliques.
Elle nous dit avec force et croyance, qu'un soin, c'est peut-être comme une œuvre d'art, d'artisanat, un parcours créatif.
Et elle nous invite avec Pierre-Michel Menger, sociologue spécialiste du monde des arts et de la culture, à penser la différence entre un travail créateur et le travail, du côté de l'incertitude quant au résultat.

Cela donne à associer aux participants de ce café :
Aran dit comment avec la présentation si vivante de Marite, elle a eu le vécu d'être rentrée dans sa pratique, et d'associer avec les 3 temps dont parle Roussillon dans son texte : celui de la prise, de la déprise et de la reprise.

Denis rappelle l'effort que l'on fait pour passer à un objet extérieur pour se décoller et s'interroge lui aussi quant à la nature des objets médiateurs entre inanimé et animé et le corps comme soi et non-soi et de demander à Marite si elle n'aurait pas aidé Tony à ne pas traiter son corps comme un objet extérieur.
Il nous questionne aussi sur comment cette question de la médiation se travaille auprès des adultes.

Je parle de ma pratique en CMP, auprès d'adultes psychotiques mais aussi névrotiques  et de comment travailler sur les représentations et différences entre l'infantile et infantiliser. Il s’agirait alors de permettre aux patients l'accès à l'archaïque dans le respect des défenses existantes.

Sandra parle de ce que la médiation peut induire chez les adultes, en terme de sens, d'imaginaire, de représentation (groupe relaxation, groupe théâtre).

J'évoque le jeu « l'air de rien », le choix des objets rassurants et codifiés socialement (coussins, set de table IKEA...)

Odile nous dit qu'avec les personnes âgées l'explication de la technique permet de lâcher avec les défenses.
Il est aussi question des adolescents qui refusent parfois de jouer pour ne pas faire trop petits.

Joséphine associe avec son travail à domicile chez les personnes âgées, pour lesquelles l'objet est souvent désinvesti et combien il peut est difficile de trouver des médiations, des médiations qui ne sont pas matérialisables pour tenter de se rencontrer.

Et alors quand il n'y a pas d'objeu (au sens de Roussillon), est-ce qu'on parle vraiment de médiation ? Qu'est ce qui fait médiation ?
La dimension temporelle de la créativité arrive dans nos échanges et les personnes âgées s'invitent dans les associations de nos collègues, comme des témoins d'une histoire qui a été créée... ?

Je vous laisse sur cette interprétation qui est la mienne, remercie Marite pour la richesse de son propos.

Nous allons, quant à nous, plancher cet été pour une nouvelle saison des cafés psychomot' et sommes preneuses Odile et moi, de toutes vos envies, suggestions de thème dont vous voudriez entendre parler...

En attendant un bon printemps et un bon été à chacun d'entre vous...

Pour l'ARRCP,
Natacha Vignon

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