L'Association de Réflexion et de Recherche Clinique en Psychomotricité de Lyon et sa Région vise à promouvoir la recherche clinique en psychomotricité par divers moyens notamment : l’organisation de séminaires, colloques, groupes de réflexion. Soutenir des projets individuels ou collectifs de recherche sur la clinique psychomotrice, favoriser et/ou rechercher la collaboration avec des structures à même d’apporter une contribution directe ou indirecte au but poursuivi par l’association et tout particulièrement avec l’Institut de Formation en Psychomotricité de Lyon.
Elle s’adresse à tout psychomotricien désireux d’engager un travail d’approfondissement théorico-clinique, quel que soit son champ d’exercice professionnel ou son référentiel théorique et clinique.
Susciter les échanges, favoriser le débat entre psychomotriciens, soutenir la réflexion et la recherche à propos de la pratique, telles sont les ambitions de l’ARRCP Lyon et région. Dans cet objectif, l’association mise sur l’engagement de ses membres dans une démarche qui consiste à se confronter aux difficultés et aux doutes rencontrés dans la clinique, à approfondir ses intuitions cliniques, à les arrimer à des concepts théoriques, à transmettre et discuter les résultats de ses travaux.

mardi 22 mai 2012

Quelques mots du Café-Psychomot du 15 mai 2012

C'est dans un Mondrian, tout intime et en petit groupe, que nous terminons cette saison des cafés psychomot sur le thème de la sexualité .
 
Thomas Bertero nous plonge avec lui dans sa rencontre avec Lisa, petite fille, âgée de 5 ans.

Il nous dit combien la lecture des textes proposés de Paul-Claude Racamier et Denis Vaginay est venue se coller avec cette situation clinique, au combien troublante, gênante et culpabilisante.

Dans une presque mise à nu, il nous raconte combien la rencontre avec cette enfant et la brutalité de ses mots connotés de sexualité est rentrée en collision avec une suspicion d'inceste.

La théorie s'efface,  ne semblant pouvoir permettre de se décoller et Thomas nous raconte cette histoire de « fesses ». Les fesses et l'orifice anal parlés par les mots de Lisa semblent à eux seuls évoquer les fantasmes d'une sexualité incestueuse.

Thomas nous parle de ses vécus, de ses fantasmes et de combien le rapprochement corporel dans le travail, les enveloppements, les propositions de portage chauffent la relation.

La sexualité entre innocence, confusion s'agit pendant les séances.

Dans sa présentation, Thomas vient tenter de relier ses vécus et ce qu'il imagine d'un amalgame entre tendresse et sexualité. Il nous cite Racamier qui évoque la tendresse : comme le premier moyen d'aimer et les premières satisfactions en lien avec les soins maternels.

La tendresse revêt un aspect technique : la mère porte, entoure, caresse, lange, manipule...

La tendresse a aussi un objet : le corps et en particulier la peau  qui lui confère deux qualités : continuité et tact.

C'est, pour Racamier, un dérivé sensualisé d'une sexualité dépulsionnalisée, c'est à dire une libido sans décharge, dans laquelle il n'y a pas de recherche de satisfaction immédiate, mais plutôt la transmission d'un sentiment d'autoconservation.

Thomas nous faire part de son tiraillement entre la représentation, étayée sur des hypothèses psychanalytiques, d'une recherche chez Lisa d'une nourriture de tendresse et l'impensable à penser,  la transgression de l'interdit ultime. Il nous cite alors D.Vaginay qui définit l'interdit de l'inceste comme « la loi d'où découleront toutes les lois permettant de définir des conditions du développement social ». Il explique dans son texte, nous rapporte Thomas,  qu'il y une différence entre interdire, s'interdire un acte et ne pas s'autoriser à en concevoir l'existence et éviter d'en accepter la réalité.

Thomas nous dit qu'il y aurait à concevoir une nécessaire érotisation du lien, caractérisé par la réalité du plaisir, tant que ne rentre pas en compte une excitation sexuelle directe, lien constitué aussi de manque, de frustration, nécessaire à la construction de l'identité sexuelle.

Pour terminer son histoire de Lisa, Thomas, avec beaucoup d'authenticité, nous rappelle que c'est bien en ne renonçant pas à aller se confronter à ses pensées, et à la culpabilité que lui a fait vivre cette enfant, qu'il continue à pouvoir et vouloir l'aider.
 
Cette présentation de Thomas va nous faire réagir et c'est d'abord du côté des  hypothèses clinique que nous échangeons, comme pour, dans notre groupalité,  tenter de sortir de la sidération et faire sens.

Pascale  amène l'idée de la curiosité infantile qui disparaîtrait, comme si il y avait une contamination de l'impensable incestuel.

Céline  nous invite à penser les éprouvés corporels de Lisa et son rapport à l'espace, le devant et le derrière.

Une image arrive : « Un être dans la jungle » et se pose la question de l'humain et du non humain.

Denis  nous rapporte une expérience et l'importance de maintenir le lien avec le parent afin de protéger l'espace thérapeutique et se sentir tranquille.

Roland nous rappelle que c'est la première fois que dans nos cafés psychomot la clinique arrive autant et amène quelque chose de la conflictualité et de la différence à recevoir cette situation « parlante »  selon que l'on soit psychomotricien homme ou femme. La position masculine est alors peut-être rendue plus difficile du côté d'une distanciation et d'une possibilité d'être dans une hypothèse du côté d'une fantasmatique de l'enfant.

Ça « chaufferait » presque entre nous, selon que l'on se place du point de vue de la fantasmatique sexuelle adulte ou enfant et je rapporte une expérience sur mon lieu de travail d'une situation clinique incestueuse qui nous faisait nous « chauffer » entre nous.

D'une manière plus générale, nos échanges deviennent presque philosophique du côté de l'homme et de la femme qui serait, sous le primat du maternel, presque déniée dans sa sexualité infantile.

Mathilde parle de relation d'humain à humain, où il y aurait presque à mettre de côté la question du génital.

Et Roland de rebondir sur la position clinique du psychomotricien, qui, en levant l'interdit du toucher, serait « sur le fil » et peut-être même embarrassé à l'idée de pouvoir provoquer de l'excitation en favorisant le sensoriel.

Des échanges riches où chacun présent nous parle de ses vécus, ses éprouvés : comment parler de sexualité ?, comment y répondre ?, quoi faire de nos malaises qui nous mettent face à nous même, à notre propre sexualité... ?

 Nous aurons, à défaut de répondre à toutes nos interrogations, tenter de mettre cette question si complexe au travail entre nous. La présentation intimiste de Thomas nous aura sans doute permis de ne pas aller trop nous défendre dans l'intellectuel et de nous laisser , une fois de plus, nous questionner, et porter par le dynamisme de notre position clinique éminemment du côté des éprouvés dans le corps.
 
Il ne nous est pas facile d'arrêter cette riche soirée et nous nous quittons avec l'envie de nous retrouver pour une prochaine saison...Des idées nous arrivent : comment continuer à attraper cette question de la sexualité ? Un thème se dessine aussi : le psychomotricien et sa place dans l'institution...
 
Ces cafés psychomot 2011-2012 ont été très riches de partages, de réflexions et c'est avec plaisir que nous vous retrouverons, Odile et moi, à la rentrée...

Mais avant cela, bonnes vacances !
 

Natacha Vignon pour l'ARRCP