Un aperçu du Café Psychomot' du mardi 4 novembre 2014
La
temporalité en psychomotricité.
Café psychomot’ du 4 novembre 2014 animé
par Natacha Vignon et Odile Gaucher
La
météo du jour et les inondations rhônalpines ont un peu bousculé la temporalité
de nos rencontres… En préparant notre
café-psychomot, nous avions omis l’incidence du temps météorologique !
Certains
d’entre vous n’ont pu rejoindre le Mondrian. A défaut, vous trouverez ce
compte-rendu. Nous étions 17 rassemblés dans l’atmosphère chaleureuse du
Mondrian et du groupe.
Natacha
a proposé notre introduction à deux voix en solo. Et en inversant nos
présentations, nous avons pu réfléchir tout autant sur le temps de la
sidération et la crainte de l’effondrement dans le contexte du déménagement
« temporaire » de l’institution dans laquelle travaille actuellement
Natacha que sur le déroulé temporel de notre travail de psychomotricien à
partir de différentes expériences professionnelles d’Odile.
Introduction commune.
Le
temps c’est la vie. Du passé à l’avenir, l’histoire se déroule… Et que raconte
celle du psychomotricien ? A quel rythme travaille-t-il ? Sa cadence
peut être régulière mais aussi chaotique en d’autres périodes.
Depuis la nuit des temps, le temps est
pensé, étudié, illustré, représenté par les mathématiciens, les philosophes,
les peintres (les tableaux du Caravage),
dans la mythologie grecque.
Dans la mythologie alexandrine et
romaine, Chronos est le père des Heures, personnification des douze heures du jour ou de la nuit.
Dans sa représentation moderne, qui
n'existe pas dans la mythologie classique, c'est un vieil homme doté avec des
ailes noires, armé d'une faux et d'un sablier.
Sur des mosaïques romaines (mosaïque du
zodiaque) on trouve Aion qui personnifie l'Eternité.
Dans la littérature : « A la recherche du
temps perdu », « La vie devant soi »…
Et dans la chanson : on ne peut
qu'avoir en tête des mélodies comme « Yesterday, » « Avec le
temps », « La valse à mille temps »…
Enthousiasmé
par le jeu des rencontres le psychomotricien est le plus souvent dynamique. Mais tout de même, la temporalité des soins
psychomoteurs ne dépend pas que de lui. Il y a tout d’abord le patient qui en
décide aussi. Et l’institution impose ses propres rythmes.
Comment
le psychomotricien tente-t-il de s’accorder au mieux avec ces injonctions tout
en préservant la qualité temporelle du déroulement des thérapies, du tout
premier accueil jusqu’à la fin du soin ? Comment le processus
thérapeutique avance-t-il en séances, mais aussi durant l’échéance qui les
sépare ?
En
cliniciennes que nous sommes, c’est en partant de nos expériences
professionnelles que l’une, puis l’autre, allons préciser notre présentation.
Après ce moment fusionnel à deux voix, voici celui de la différenciation…
Eloignons nous un peu pour mieux nous compléter l’une l’autre !
Natacha :
Je
vais vous parler d'un temps : le
temps de la sidération.
Je
remarque immédiatement le paradoxe dans mon titre.
Un
paradoxe contenant peut-être quelque chose
d'un hors temps, mesurable
seulement comme un temps objectif au sens où l'entend le philosophe Henri
Bergson.
Bergson
oppose le temps objectif à la durée (ou temps subjectif). Le temps objectif correspond à la vision
scientifique du temps. C'est le temps mesuré par l'horloge, celui qu'on divise
en heures, minutes et secondes.
Mais Bergson reproche à la science de manquer
l'essence du temps. Croyant mesurer le temps, le scientifique mesure en réalité
de l'espace (l'espace parcouru par exemple par l'aiguille de l'horloge ou par
le sable dans le sablier) et, du reste, spatialise le temps, comme le montre
cette habitude de représenter le temps par une droite c'est à dire par un
espace. Le scientifique manque l'essentiel, ignore la réalité du temps. Cf. Henri Bergson, La pensée et le
Mouvant, Editions Puf Quadrige, Paris, 2008, p. 3 : « La ligne qu’on mesure
est immobile, le temps est mobilité. La ligne est du tout fait. Le temps est ce
qui se fait, et même ce qui fait que tout se fait. »
Dans « La Pensée et le mouvant, »
en résumant tout son parcours de pensée Bergson écrit « Mais cette durée, que la science élimine,
qu'il est difficile de concevoir et d'exprimer, on la sent et on la vit. Si
nous cherchions ce qu'elle est ? Comment apparaîtrait elle à une conscience qui
ne voudrait que la voir sans la mesurer, qui la saisirait alors sans l'arrêter,
qui se prendrait enfin elle-même pour objet, et qui, spectatrice et actrice,
spontanée et réfléchie, rapprocherait jusqu'à les faire coïncider ensemble
l'attention qui se fixe et le temps qui fuit ? »
Le
temps réel est la durée, dimension de la conscience. Le temps subjectif est le
temps vécu, celui qui fait paraître certaines heures plus longues et d'autres
plus courtes, celui surtout qui se révèle dans l'expérience de l'attente.
Détour par la clinique....
Autant
dire une transition de longue durée.
Ce
déménagement pourtant prévu, vient à mon sens sidérer et figer le temps.
C'est
comme si tout était bloqué, comme s'il n'était plus possible de rêver, comme si
le temps était suspendu. Et le vécu ne s'imprime plus en soi, l'expérience
d'être là ne paraît pouvoir s'inscrire dans une temporalité.
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résidents et beaucoup de professionnels sont donc à vivre, subir ensemble ce
déménagement et la sidération est là.
Cela
me fait penser à celle qui peut naître dans la rencontre avec le handicap
lourd. L'impensable, l'irreprésentable, l'innommable ne peut être vécu, venant
attaquer toute possibilité d'inscription dans un devenir, et la rêverie sur et
avec l'autre.
Les
parents d'enfants handicapés ont souvent bien eu à faire avec cela et ils en
témoignent avec une hypermnésie redoutable, quand le médecin leur a annoncé que
leur enfant avait un problème. La mémoire souvenir dont parle aussi Bergson
semble coupée d'une autre mémoire celle de l'habitude (celle de l'action).
On
pourrait aussi rapprocher cela de la question
du traumatisme psychique. Simone Korffe-Sausse et plus près de nous Gaëtan
Munoz, s'attachent à nous montrer combien il n'est alors plus possible de se
projeter dans un devenir, dans un temps à vivre, à rêver et dans le « un
jour tu seras grand ».
Dans
le nouvel établissement, je me souviens y travailler deux jours par semaine.
Les
journées passent étrangement, je n'y ai pas d'espace pour recevoir mes
patients. Les suivis individuels et groupaux sont donc interrompus depuis 3
mois.
Le
temps me paraît insaisissable, je ne sais même jamais quelle heure il est. Le
bruit des assiettes sur les tables d'une salle à manger me rappellent qu'il
doit être midi bientôt. Je n'arrive pas à écrire. Je ne sais pas où sont mes
patients, où est leur chambre, leur groupe.
Je
me mets à penser la réactivation de cette sidération des premiers moments
et peut-être aussi tout au fond la crainte de l'effondrement décrite par
D.W.Winnicott.
L’exploration du traumatisme entraîne Winnicott
à parler de déprivation pour qualifier ce « rien ne s’est produit », dont la
manifestation sera un sentiment « d’effondrement dans l’aire de la
confiance, qui retentit sur l’organisation du moi »
À la perte de confiance qui en résulte répond
la perte d’espoir « dans les possibilités à venir de la poursuite
de l’intégration psychique ». Le désespoir, un sentiment d’insécurité
profonde, la crainte permanente d’un effondrement, de la folie, de la mort sont
le terreau d’une rancune, d’une envie stérilisantes. L’envie et le traumatisme
originel plongeraient ainsi leurs racines communes dans l’ « être »,
dans les failles de son devenir.
La crainte de l’effondrement, projetée dans
le futur, serait l’écho d’un « effondrement de l’institution du self
unitaire » vécu-éprouvé dans le passé. Ce breakdown, marquant de
son traçage négativant la chair vive du tissu psychique, aurait laissé un vide,
une lacune, dont l’activation serait à la source d’angoisses disséquantes
primitives et impensables. Au creux de l’être en proie à une crainte de
l’effondrement, résiderait un non-being, trace blanche, lacunaire d’une
« mémoire amnésique » (André Green) d’un « quelque chose (qui)
aurait pu être bénéfique (et où) rien ne s’est produit ».
Je
me rends bien compte que je n'inscris plus de rdv dans mon agenda et que
péniblement j'essaie de faire l'effort de penser quels résidents je recevais et
quand, avant.
J'essaie
quand même d'aller à la rencontre de mes patients … dans les couloirs, dans la
chambre, dehors. J'entends Jérôme, jeune patient aux traits autistiques répéter
sans cesse « où elle est la chambre » et s’agripper à mon bras et me
tirer jusqu'à celle-ci.
Je
me dis alors qu'il l'a repéré, mais qu'il ne semble pas comprendre ce qu'il
fait là.
Emmelyne
, elle, plus directement, demande tous les jours et plusieurs fois par jours
quand est ce qu'elle retourne à l'autre foyer. Elle semble s'être trouvé un
endroit pour dormir et laisser passer le temps. C'est en tout cas ce que je me
dis quand je la vois près du radiateur où elle passe la majeure partie de la
journée. Dans l'autre foyer justement elle dormait aussi beaucoup, diminuée
dans son corps, par une maladie neuro-dégénérative atteignant son tonus
musculaire, mais elle coiffait ses poupées à qui elle racontait des histoires.
Emmelyne demande là que ses poupées soient rangées au même endroit dans sa
chambre, assisses sur un fauteuil manuel, les unes contre et sur les autres et
elles ne doivent pas bouger d'un millimètre. Mes collègues me disent à quel
point c'est obsessionnel.
Véronique,
que je suis depuis plusieurs années, quand je la croise et lui dit que nous
réfléchissons à comment reprendre les soins en psychomotricité me répond par un
« on verra si on se revoit » et détourne son regard du mien. Me
ferait-elle sentir quelque chose de son vécu d'abandon ou de lâchage ?
Je
pense aussi à Sandra et à Nathanaël, avec qui nous avions fabriqué de la
transitionnalité si j'ose m'exprimer ainsi.
Avec
tous deux, il a été question d'un objet à créer, à emporter lors du
déménagement.
Je
me dis en pensant à ces deux patients , qui ont avec persévérance, insisté pour
qu'un espace de soin puisse se recréer pour eux, combien la temporalité en a
pris un coup et surtout combien il m'était
impossible de reprendre le cours du soin et mes notes dans lesquelles j'aurais
pu facilement retrouver la trace de ces objets.
Je
ne m'en souvenais plus...
Pour
Sandra il s'agit d'un dessin que nous avons réalisé lors des dernières séances
dans l'ancien établissement. Un dessin représentant la salle et inscrit de nos
prénoms.
Pour
Nathanaël, il s'agit d'un balle à demi-transparente, en plastique dur contenant
un ballon de baudruche qui avait explosé lors d'une séance il y a bien
longtemps et que j'avais gardé dans ce contenant.
Qu'est donc devenue cette aire
transitionnelle ?
Ici
c'est comme si le handicap était à nouveau propulsé sur le devant de la scène,
que l’exiguïté des couloirs, des chambres, les longues attentes devant l'unique
ascenseur, les passages ratés des résidents en croisant d'autres, le
rapprochement, replongeaient dans les abîmes du corps et ses entraves et
faisait revivre aussi les liens comme source d'insécurité et d'angoisse.
L'institution
aurait-elle été prise, à son insu, dans un débordement de ses fonctions
contenantes et sidérée dans ses fonctions d'élaboration ?
Serions-nous
alors dans le risque que décrit Albert Ciccone d'une symbiose secondaire,
toxique et bien souvent mortifère ?
Cette
structure d'accueil temporaire trop étriqué, trop ramassé, manquant cruellement
d'espace entre deux, ressemblerait à un retour dans le magma primitif et
l'indifférenciation, comme une naissance à refaire ?
Moi-même,
aurais-je été comme les parents, aliénés par des vécus irreprésentables, face à
l'impossible du temps réel, à l'impossible illusion créatrice ?...
Alors
, je pense à un autre résident, plus discret, le chat de l'institution. Il
cherche sa place, n'est plus propre, semble fortement perturbé par ce
déménagement. Et sans faire de la grande psychologie de chat, il est connu que
ces animaux ont besoin de repères stables et fixes. Ça me rappelle le thème de
nos cafés psychomot l'année dernière sur la créativité et la médiation en
psychomotricité. Quelle drôle de médiateur que Frimousse , qui me permet de me
souvenir de son âge, de son arrivée dans l'autre établissement, de ses
différentes « adoptions » par des résidents...
Sa
maladie, sa vulnérabilité est actuelle, il vient d'être opéré et sa vie est
bien menacé. J'ai envie de penser qu'il va survivre de cette expérience
traumatisante, qu'il sera le porte-voix d'une expérience de dépassement et
d'élaboration d'un fameux déménagement. (un de mes chers collègues m'aidant à
élaborer, m’a, dans un élan très lacanien fait remarquer le signifiant du mot
dé/ménagement, privé de ménagement...).
…
Odile :
·
Les plus courtes, chez les prématurés, mais
aussi en soins palliatifs… C’est toujours dans la surprise qu’un prématuré naît
trop tôt, et même si la mort est attendue en service de soins palliatifs, elle
nous surprend toujours.
Et
si ces deux expériences semblent être aux opposés, qu’est-ce qu’elles se
ressemblent. Tout d’abord par l’intensité
émotionnelle des rencontres… Est-ce
que ce p’tit bout de 600g va pouvoir survivre ?... Et dire que ce patient
que j’apaise par mes massages relaxants va mourir bientôt ; il est
pourtant là bien vivant dans ce peau à peau… Cette intensité émotionnelle
oblige les équipes à des temps de parole indispensables : relèves,
synthèse, supervision pluridisciplinaire, plus tous les temps informels de partage.
Une
autre similitude dans ces deux cliniques est la place primordiale laissée à la
famille. Rencontrer le prématuré dans les bras d’un de ses parents, c’est la
condition indispensable à la facilitation d’un meilleur attachement. Rares ont
été mes propositions de stimulation psychomotrice en étant seule avec le jeune
bébé. Celles-ci avaient alors pour but de soutenir l’équipe de puéricultrices
dans leur présence auprès du bébé, dans le cas où les parents étaient trop peu
présents (état de santé grave de la mère…)
En
soins palliatifs, l’ensemble des soins médicaux, infirmiers ou psychomoteurs se
déroulent toujours en présence des proches, si le patient le souhaite. Ça peut
être une réelle demande de sa part, ou bien au contraire, le patient peut
choisir de profiter de chacune des présences familiales et soignantes à tour de
rôle, comme dans un relais de présence auprès de lui.
Du
fait de la courte durée de prise en charge (d’une semaine à six mois), les
séances sont fréquentes (3 à 5/semaines), chez les prématurés comme en USP. Le
psychomotricien est donc convoqué dans une grande adaptabilité… Comment choisir
les moments des séances afin non seulement qu’ils répondent le mieux possible
au patient et leur famille, mais aussi que ces séances puissent s’interposer
entre les séances des autres patients… Agenda indispensable au quotidien pour
s’y retrouver !!
La
fréquence rapprochée des séances correspond non seulement à l’état de présence
très évolutif du patient prématuré ou adulte en fin de vie (état de conscience,
épisode douloureux…), mais je pense qu’elle permet dans la répétition des
rencontres de créer un rythme redondant, rassurant… Daniel Marcelli nous
parlerait de macro-rythme.
·
Des durées de prise en charge variables en
gériatrie hospitalière, en fonction du projet d’hospitalisation. Le court
séjour correspond à des temps de médecine interne (de 15 jours à deux mois), le
SSR, Soin de Suite et de Réadaptation, autrefois appelé « moyen
séjour », a pour projet entre autre la rééducation (ex : rééducation
à la marche après fracture du col du fémur), et le long séjour un accueil
médicalisé du patient physiquement et/ou psychiquement dépendant.
·
Des durées tout aussi variables pour les ados et
jeunes adultes souffrant de troubles des conduites alimentaires : de 3
semaines, le temps pour un patient boulimique de vivre un sevrage qui vient
interrompre l’avalanche des crises devenues incontrôlables, jusqu’à 10 ans de
thérapie pour que Anna, une patiente anorexique accède enfin au plaisir de
vivre sa vie adulte.
Le rythme des prise en charge est très
variable, fonction du dispositif de soin : hospitalisation complète,
hospitalisation de jour, ambulatoire, quel que soit l’âge et la pathologie du
patient.
L’horaire des séances doit être parfois
souple quand cela répond à la disponibilité du patient (fatigabilité en soin
palliatif, mais aussi dans l’anorexie grave, besoins physiologiques du
patient au risque d’être caricatural : sommeil du bébé, repas en
unité des troubles des conduites alimentaires, sieste de la personne âgée…), ou
doit être dans d’autres circonstances fixes (prise en charge des ados pour
éviter le vécu d’abandon lié à l’attente de la séance, mais aussi en gériatrie
pour instaurer une rythmicité des soins sur laquelle les repères temporels du patient parfois floutés par le vieillissement
peuvent s’étayer…)
La durée des séances est à ajuster à la
disponibilité des patients :
·
20 mn à ½ heure, ça peut être déjà beaucoup pour
un bébé, un être âgé ou une personne fatiguée physiquement par la maladie.
·
En dehors de ces cas de figure, la durée idéale
des séances individuelles semble être de trois quart d’heure : le temps de
s’installer pleinement dans une médiation, de la vivre et d’échanger sur nos
ressentis, le temps d’une rencontre enrichie ou le temps de l’ennui… Pour cela,
un seul conseil, psychomotriciens, gardez l’œil sur votre montre !
Quand
la durée de la séance est fixée
d’avance, l’envie de la terminer plus tôt, mais aussi le retard de fin de
séance peuvent être signifiant. C’est par exemple la difficulté à se séparer de
la patiente boulimique, ou « l’envie d’en finir » de la personne
âgée.
La
durée de la séance vient soutenir notre cadre interne, pour appuyer le projet
de soin co-créé avec le patient tant que faire se peut. Les retards de début de
séances, leurs fins avortées ou leur dépassement marquent tout autant la
compliance, la mise au travail, que les attaques du cadre que le patient agit
sur nous ou avec nous. Mais il nous faut être assez rigoureux avec notre propre
temporalité, afin de ne pas attribuer au patient des manquements liés à nos
propres défaillances… car il est bien clair que nous en avons !
Le temps de la prise en charge
groupale : une vigilance toute particulière. Prendre le temps de penser les groupes alors que les institutions
nous demandent de plus en plus de faire
des groupes.
Toute
la difficulté du groupe réside à penser tout autant le dispositif groupal qui
pourrait enrichir le soin de nos patients que repérer pour chacun d’eux en quoi
ce groupe lui serait intéressant. Cela revient à croiser projet de groupe et
projet de soin individuel, ce qui n’est pas une mince affaire et demande non
seulement du temps, mais aussi beaucoup d’énergie et de vigilance.
Si
une thérapie psychomotrice individuelle peut se mettre en place assez
rapidement et simplement dans les suites d’une première rencontre argumentée
par notre observation psychomotrice étayée ou non d’un bilan, le groupe
thérapeutique, lui prend corps progressivement en pensant encore le dispositif
(Faut-il l’adapter au vu des patients qui le constituent ?) à la croisée
de la clinique de chaque patient susceptible d’y participer.
Le temps entre les séances permet au
processus thérapeutique d’évoluer :
·
Pour le patient, et cela nous échappe…
·
Pour nous, à notre insu, ou bien de façon toute
à fait recherchée au travers de synthèses cliniques, supervisions, écritures,
guidance de stage… et les temps de réflexion de l’ARRCP !
L’écriture,
un temps personnel de travail tellement aidant…qui pourrait à lui seul faire
l’objet d’un café-psychomot !
J’insisterai
bien volontiers sur le temps de l’écriture du psychomotricien. Au-delà de nos
notes de séances, écrire, c’est structurer un récit qui soit compréhensible par
le lecteur potentiel, mais c’est au moins autant reconstruire la trame
temporelle de nos rencontres, y retrouver le sens de notre projet thérapeutique
et comment celui-ci évolue dans cette histoire de rencontre. Il s’agit
finalement de narrer des histoires de soin de leur début à leur fin, nous
projetant bien sûr bien au-delà, c’est-à-dire remontant avec la première
rencontre sur l’histoire de vie du patient depuis sa naissance, voire même
avant, dans l’attente parentale, mais imaginant aussi la fin du soin comme son
cheminement plus autonome dans son avenir sans nous, avec tout au plus le
possible souvenir encore porteur de nos séances.
Et le temps de débattre résumé ici en
quelques mots :
Parmi
nos échanges, comment être là en restant présent à nos patients pour vivre
ensemble l’expérience traumatique du chaos institutionnel : transformer le
temps de la sidération en temps de traversée du chaos, nous dit Pascale.
Mais
aussi l’importance de considérer le temps dans son lien étroit à l’espace, à
partir de l’expérience de Natacha, mais aussi celle d’Alexandra qui nous
explique comment ,créer un groupe en gériatrie dans un lieu passant,
l’obligeait à cadrer beaucoup les séances alors que dans un lieu de soin mieux
défini et fermé, protégé, lui permettait de se sentir beaucoup plus libre dans
ses propositions. Cela fait référence à notre propre cadre interne et à comment
il peut parfois être protégé, et parfois mis à mal par l’institution.
Mélanie
reprend la référence à Marcelli dans la ritualisation qu’elle instaure souvent
dans sa façon de travailler (accueil-retrouvailles, propositions de travail
corporel et fin de séance). Cette ritualisation fait contenance, comme les
macro-rythmes définis par Marcelli.
Aran
nous dit aussi comment ,travailler à partir du rythme, (avec les percussions
corporelles par exemple) étaye le temps de la rencontre dans le dialogue
rythmique qui prend corps en s’inscrivant dans l’ici et le maintenant de nos
séances.
Nous
terminons ce café-psychomot réchauffés par nos échanges, en annonçant le
prochain : ce sera le mardi 24 février 2015. Cécile Mottet nous présentera
comment le temps de l’écriture soutient son travail, à partir d'une expérience
clinique longue et dans laquelle le traumatisme et la sidération ont été très
opérents.
Mais
avant, nous pourrons nous réunir le 31 janvier 2015 lors de notre Journée
d’étude. Pour plus d’informations, veuillez surfer sur le blog.
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